Pourquoi nous avons choisi de nous exprimer sur le Black Out Tuesday.

À la suite des récents événements suscités par l’arrestation mortelle de Georges Floyd par un policier aux Etats-Unis, un mouvement de colère généralisé a envahi les rues et les réseaux sociaux. Certaines marques y ont pris part. D’autres non. D’autres plus tard. D’autres jamais. 

En tant que fondateur - blanc, je le précise - d’une marque de baskets, j’ai entendu plusieurs avis de la part de notre communauté sur le rôle et la responsabilité d’une marque dans ce contexte ; ce qui nous a amenés à nous interroger : est-ce notre rôle de communiquer sur le #BlackOutTuesday. Et si oui, comment ?

La question sous-jacente à celle-ci est de savoir si oui, ou non, une marque est un média politique. En interagissant directement avec les citoyens d’un pays, les marques ont une influence. De fait, oui, chaque marque est un instrument politique.

Pour y échapper, il faudrait pouvoir être neutre sur tous les sujets. Or, en produisant, en communiquant, une marque a nécessairement un rôle culturel, éthique, environnemental. Nous avons tous, à notre échelle, une voix, un impact, une responsabilité. 

Alors, si toute organisation est politique, peut-elle choisir ses sujets ? Peut-on parler d’écologie et ignorer les questions de discrimination ? Peut-on parler d’inclusion et ignorer les questions sociales liées au pouvoir d’achat ? Peut-on parler de bien-être et tourner le dos aux violences contre les minorités ?

Et parallèlement à ça, est-ce légitime de se montrer solidaire d’un sujet par la simple parole ? Ou, au contraire, il y a-t-il une implication minimum à avoir, un « ticket d’entrée » à la solidarité ? Si oui, comment mesurer cette implication ? 

Enfin, peut-on échapper à une logique de récupération commerciale d’un combat aux yeux de ceux qui estiment - à raison ou à tort - qu’il n’est pas « le nôtre » ?

Notre position par rapport à toutes ces questions est la suivante.

Nous considérons, naturellement, qu’une marque se doit d’être cohérente, de ses valeurs à ses activités, en passant par ses prises de parole.

Le choix ou non de communiquer sur un sujet appartient alors à l’organisation et à la mission qu’elle s’est donnée. S’exprimer sur toutes les causes reviendrait à ne pas s’y attarder, à s’éloigner de sa vision première, au risque de désengager sa communauté. Des choix s’imposent donc.

Si nous avons choisi de nous exprimer sur ce sujet, c’est parce que l’idée même de la basket, en tant que produit culturel, trouve son origine dans un brassage d’identités parmi lequel la communauté noire a joué un rôle absolument déterminant. Aujourd’hui, en fabriquant des baskets, nous célébrons chaque jour cette fusion de cultures qui nous a enrichis. Par ailleurs, l’idée fondatrice de notre marque est celle - en partie utopique - d’une basket pour tous. Mais c’est bien cet idéal d’inclusion qui continue de nous inspirer chaque jour.

Aussi avons-nous choisi de prendre part à ce mouvement, comme nombre de citoyens et d’autres marques, avec la sobriété qu’il exigeait. Un carré noir, posté sur Instagram, avec la mention : « Nous prônons une culture d’inclusion, de respect, et d’ouverture. Ensemble, entraidons-nous à sortir de l’ignorance pour contrer toute forme de racisme, de stigmatisation et de discrimination #blackouttuesday ». 

Il s’agissait là de témoigner notre soutien à cette action, pour une plus grande reconnaissance des droits d’expression, de circulation de la communauté noire. Il s’agissait aussi d’affirmer notre opinion sur ce sujet auprès de notre communauté pour contribuer à le rendre visible.

Qu’avons-nous fait de plus ? Écrire cet article, et prendre du temps pour réfléchir à la question du racisme, en discuter avec nos proches, comprendre, s’instruire. Mais nous pensons que peu vaut mieux que rien, et que toute action utile démarre par un premier pas. Non pas pour s’acheter une conscience. Mais pour commencer à agir et à regarder la réalité en face.

 

Illustrations par @sacree_frangine